Wayfarers of the South Tigris

Un prix décerné pour les jeux Expert par des Experts

Wayfarers of the South Tigris

Je me suis demandé avec quel review de jeu j’entamerais cette année 2023. Il y en a encore tellement à présenter que j’avais l’embarras du choix. Mais l’envie de parler du dernier jeu d’un auteur et d’un illustrateur que j’aime particulièrement me semblait couler de source.

Wayfarers of the South Tigris de Shem Phillips et S J Macdonald édité chez Garphill Games sera traduit en français par Voyageurs du Tigre du Sud chez Pixie Games (prévu pour février 2023, pour Canne sans doute). C’est comme toujours Mihajlo Dimitrievski qui s’occupe des illustrations, toujours superbes, et qui s’est fait un nom (difficile à prononcer et retenir 😉 ) dans le monde du jeu au vu de son palmarès actuel (252 jeux signés). J’adore l’artiste (mon top 3 avec O’Toole et Coimbra).

Après le nord et l’ouest, vient donc de sud pour une nouvelle trilogie (on se demande si la fin de la trilogie de l’est signera la fin de Garphill 😉 ). On se retrouve donc en Mésopotamie avec le Tigre (moment géographie, il prend sa source en Turquie et s’écoule via la Syrie et l’irak jusqu’au golfe Persique). Il passe par Badgad, point de départ de votre voyage et centre de votre plateau de joueur.

Votre plateau comprend un espace de ville, un port, un habitant spécialisé, une vue sur les étoiles, un observatoire, une bibliothèque et votre caravane. Le jeu va se développer depuis 3 bases (mer, terre et voute céleste) en plaçant des cartes achetées autour du plateau central. Ce dernier, outre les cartes à acquérir, est constitué d’une zone de progression représentant ce que vous noterez dans votre livre de voyage au fur et à mesure de votre exploration.

Vous choisirez votre « chemin » dans le livre selon ce que vous découvrirez, car il y a des conditions pour progresser. Trouver des paysages spécifiques, développer votre caravane, répertorier les étoiles,… Ces options dépendront de votre cheminement et du côté du plateau (en 3 parties, recto verso) que vous aurez mis en place, proposant ainsi 8 combinaisons possibles. C’est d’ailleurs l’arrivée à la fin du plateau qui activera la fin du jeu, dont la durée dépendra donc du rush (ou pas) que feront les joueurs sur cette partie du voyage.

Le tour de jeu est très simple, le joueur ayant le choix entre :

  • Placer un de ses dés sur une case d’action de son plateau (pas de blocage des autres joueurs).
  • Jouer un des ses ouvriers sur le plateau commun (blocage de couleur).
  • Se reposer (pour récupérer ses dés uniquement)

Le premier truc spécifique vient des ouvriers qui ne nous appartiennent pas et, qui une fois posé sur une carte par un joueur, seront récupérés par le premier joueur qui achètera la carte sur laquelle ils se trouvent. Ils permettent d’activer certaines actions (récupération de ressource ou achat spécifique).

Les dés que l’on joue sur son plateau ont eux un usage nouveau. Certaines cases d’action nécessitent l’accès à un « pouvoir » spécifique : un chameau, un pigeon, un bateau, une longue vue. De base, notre caravane dispose d’un chameau et d’une longue vue, mais chaque « pouvoir » est associé à une valeur de dé. Ainsi il faut un 1 pour avoir accès au chameau et un 6 pour la longue vue. Ce sont donc les seules valeurs qui nous permettent d’activer les actions associées. Il faudra développer sa caravane pour augmenter les options des dés, ou leur permettre d’avoir de multiples valeurs (via l’usage de + ou – très subtils). Pour éviter d’être trop vite bloqué, des + ou – 1 sont accessibles via des marqueurs d’influence sur les minarets et deux cases libres de contraintes. C’est un hasard contrôlé que les joueurs devront gérer pour rester maîtres de leur jeu.

Les cartes de terre et de mer permettront d’ajouter des cases d’action pour les dés (cartes Ville et Port), mais aussi des bonus quand on réalise certaines actions (cartes paysage terre / mer). Des spécificités existent entre les deux dans les actions one shot de pose de carte purement esthétique mais ajoutant une dose de réflexion (pour les cartes de mer) peut-être de trop.

Les cartes de voute céleste représentent des PV de fin de jeu selon leur type.

  • Les étoiles : Donnent des PV selon certaines conditions
  • Les Comètes : Donnent de 1 à 3 PV par carte, 4 PV si l’on est celui avec le plus de comète
  • La Lune / Le soleil : 3 PV par carte, 7 PV si l’on dispose des 2 dans son jeu (elles n’existent qu’en un exemplaire).
  • Les planètes : Des PV selon le nombre dont on dispose

Ces PV peuvent être doublés si l’on y adjoint une carte d’Inspiration, qui vous donne un objectif à atteindre. Précisons que l’on ne peut placer une carte de voute céleste qu’au-dessus d’une carte de mer ou de terre. Normal, c’est la vue du ciel que l’on a depuis l’endroit où l’on a voyagé.

Les villageois, eux, sont placés sous des lieux qui leur correspondent (selon le badge qu’ils portent, normal de trouver un pêcheur dans une crique ou un bibliothécaire dans un port ou une ville). Ils offrent un bonus au lieu associé lorsqu’ils sont activés. Simple et malin.

Lorsque l’on se reposera, on récupérera ses dés et des bonus de ressources selon les villageois que l’on a récupéré. C’est lors de ces moments de récupération que l’on peut « naturellement » progresser dans le livre, mais cette progression et ces bonus ne peuvent être réalisés que s’il ne reste au maximum qu’un dé à jouer. Pas possible de se reposer tour après tour sans s’être « fatigué » dans des voyages. Certaines actions permettront au fil du jeu de prendre un instant complémentaire pour écrire dans son livre de voyage, donnant à certains joueurs une avance sur les autres.

Si la course à l’écriture n’est pas signe de victoire, elle apporte malgré tout des bonus (travailleurs vert ou ressources) au premier arrivé sur certaines étapes du chemin. Des dés complémentaires et des upgrades de votre caravane se trouvent aussi sur ces chemins et les bouder n’est peut-être pas une bonne idée. Je serais malgré tout intéressé de tenter une partie où les autres progresseraient sur cette voie tout en la boudant, pour voir si l’énergie économisée de la sorte serait profitable.

Ajoutons que l’on peut placer des marqueurs d’influence sur des minarets, qui apporteront des PV en fin de jeu au majoritaire, ainsi que des possibilités de plein jeu (progression sur certaines voies avec le noir, modification du dé avec le jaune, pouvoir de bateau avec le bleu). D’autres sont placés sur les cartes, nécessitant au joueur voulant interagir avec elle (pose de travailleur ou achat de carte) de payer un tribut à son propriétaire. Vu le manque flagrant de ressource durant toute une partie du jeu, cela permet d’accélérer l’un au détriment de l’autre.

Une fois la fin du livre atteint par un joueur chacun rejoue une dernière fois et on réalise le décompte :

  • PV sur les upgrades de la caravane
  • PV sur la voute céleste
  • PV de collection de badge de base (ville, port et les 2 types de paysage), à la fois dans la multiplicité d’un seul (ex : 7 identiques = 16 PV) que par groupe de 4 différents (5 PV par groupe).
  • PV de majorité sur les minarets

Au final, avec la profusion de manières de scorer, les joueurs ne finissent pas trop loin l’un de l’autre, signe que toutes les voies se valent. C’est un jeu de collection de badge, un peu comme Terraforming Mars, mais il faudra pouvoir en profiter au maximum pour réaliser les PV les plus élevés. Réussir à associer ses badges les plus présents à un objectif de la voute céleste et le doubler avec une inspiration peut rapporter gros.

Si au début du jeu on est un peu perdu dans ses premiers choix, tellement il y a de possibilités de voies de départ, par la suite on essaie de développer son plan de jeu de la meilleure manière selon les cartes disponibles et les actions des autres joueurs. Durant la partie la multiplicité des coups permet de ne pas ressentir de downtime, car on est toujours à envisager « et s’il me prend cette carte alors je devrai partir sur celle-là en urgence »… Comme on essaie de planifier ses coups entre la récolte de ressource (il n’y en a que 2, l’argent et la bouffe) et leur usage, tout en essayant de minimiser les coups perdus et maximiser les coups à double impact (réalisation d’une action + récolte de ressource).

C’est agréable, accessible dans ses règles et résolument expert dans la nécessité de se projeter et d’envisager les multiples options de jeu. On retrouve la réflexion d’un Paladin des Royaumes de l’Ouest mais avec l’impact des autres joueurs comme pour un Vicomte. Le niveau de difficulté se situera sans doute entre ces deux jeux.

Je ne lui reprocherai que deux choses, l’avantage du premier joueur pas assez compensé par les ressources de départ (le premier joueur risque fort de jouer un coup de plus que le dernier et a le loisir d’être premier sur le carnet de voyage durant tout le jeu) et la possibilité de clore la partie sur la dépense d’un seul marqueur d’influence noir (seule option réalisable facilement dans les sorties du carnet). Si je me réfère au thermoformage du jeu, des extensions sont déjà prévues pour compléter tous les trous (ou alors ils ont fumé en validant ce dernier).

Très content de ce nouvel opus qui ravira les fans de combos et de développement, comme moi. 😊

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