Amalfi

Un prix décerné pour les jeux Expert par des Experts

Amalfi

Chaque année, lorsque les portes du Spiel d’Essen ouvrent le jeudi, une cohue digne d’un Black Friday américain se met en place pour les premiers participants. Contrairement à ce que je croyais, ce ne sont pas les tables de jeu qui sont visées, mais surtout les stands dont la production disponible est limitée. Parmi ces lieux prisés il y a toujours les quelques japonais (Japan Brand par exemple) et autres asiatiques qui n’ont qu’un nombre très limité de jeux avec eux. J’étais jusqu’il y a un an peu attiré par le genre, mais l’an passé il y a eu Orchard Ocean et cette année…

Amalfi est un jeu de Yamada Takeo édité par Uchibacoya. Aucun des deux ne vous disent quelque chose et c’est fort normal puisqu’il s’agit du premier jeu de l’auteur et que la maison d’édition n’avait qu’un jeu d’échec revisité (Tank Chess) à son actif. Pareil pour les illustrateurs Urabe Rocinante et Sai Beppu, bien que ce dernier soit actif dans le milieu depuis plusieurs années, mais uniquement pour le marché asiatique.

Dans Amalfi, vous êtes un marchand italien de l’époque médiévale, originaire de la cité qui donne son nom au jeu, soucieux d’éviter le déclin de votre ville par le développement de la marine marchande. Ainsi vous allez investir dans des contrats de peintures, des livres et des constructions pour relancer l’économie. Vous aurez 4 manches pour y parvenir, chacune se terminant par un scoring d’objectif spécifique tiré au sort parmi 5.

Vous partez avec 6 navires en mer, 6 à construire et 6 colonies installables. Entre 3 et 6 pains (la nourriture négociable) selon votre position et une main de 8 personnages historiques (pré-définis ou draftés). Une manche se termine lorsque tous les joueurs ne savent plus prendre d’action parmi les 6 possible.

* Placer un navire sur un emplacement général ou privé pour recevoir des ressources (contre du pain le plus souvent)

* Acheter une carte maritime (emplacement privé) ou un contrat (parmi 3 types-couleur) avec des ressources

* Construire un nouveau bateau (contre du blé) qui sera disponible pour la prochaine manche

* Engager un personnage de sa main : Il a un pouvoir immédiat, permanent, de fin de jeu ou une fois par manche (en l’activant)

* Activer un personnage

Il convient de préciser une chose : Les bateaux dont on dispose en mer sont tout à la fois les acteurs d’activation (bloquant une position aux autres joueurs) que les ressources reçues ! En effet, les navires sont positionnés sur les cases de ressources et, lorsque l’on doit payer du blé, des gemmes ou autre, ils reviennent en mer (et disponibles donc) remplis des dites ressources, chacun représentant 3 unités (excepté les épices = 2). Donc si l’on doit payer 5 blés pour acheter un navire (en manche 2), on descendra 2 bateaux stockés sur le blé (précédemment par le biais d’une action de placement d’un autre bateau) pour générer 2*3 blés = 6. Comme on n’en a besoin que de 5, le 6ième est transformé en nourriture (pain). Le pain est ainsi la ressource d’échange, ce qui nous change des simples pièces.

Les navires de retour en mer sont ensuite réutilisés pour représenter des ressources ou activer des zones d’action. Vous comprenez vite que générer plus de bateaux permettra de réaliser plus d’actions dans les manches suivantes. C’est donc un objectif en soi pour ne pas terminer ses tours trop tôt et regarder les autres joueurs continuer à agir en vous tournant les pouces.

Acheter des cartes maritimes rapportera une zone d’action privée (et quelques PV), tandis que les contrats apportent un bonus immédiat et beaucoup de PV de fin de jeu. En marge des objectifs de fin de manche (qui apportent des PV selon les bateaux/cartes maritimes/contrats/… achetés), il existe des « milestones » (étapes) qui sont réclamés en action gratuite dès que réalisés. Ces Milestones sont souvent liés à la possession d’un certain nombre de contrats spécifiques ou des personnages actifs. Ils rapportent 15, 10 ou 5 PV selon que vous soyez le premier, deuxième ou troisième à les réaliser.

En fin de manche, vous aurez à payer du pain pour vos bateaux (ou perdre des PV). Certaines actions permettent de construire des colonies (qui permettent de stocker et générer plus de pain) ou d’acquérir de nouveaux personnages.

Cette gestion de ressource est excellente et nécessite toute votre attention et projection afin de coordonner Action-Stockage-Dépense dans le bon rythme. Mais la cerise sur le gâteau, c’est qu’en plus de l’utilisation des ressources stockées, vous pouvez déplacer un bateau situé en mer vers le port et ainsi générer 3 pts de ressource au choix, contre le sacrifice d’un navire qui ne fera plus de « mouvement » rentable cette manche. Parfois nécessaire pour souffler à un autre joueur une carte contrat que l’on voit qu’il vise en réalisant des actions de stockage. Délicieux !

Les personnages dont on dispose durant les premières parties sont fixes, leurs pouvoirs variant fort et défavorisant les premiers joueurs pour contrebalancer leur position de choix. Une fois le jeu en main, vous préférerez de loin réaliser un draft de cartes pour essayer de monter une stratégie de développement gagnante par vous même.

Après la quatrième manche, on scorera ses objectifs personnels des personnages de fin, les PV des cartes contrats et maritimes et selon le nombre de colonies construites. Les manières de se développer sont nombreuses et gardent ainsi une tension continue, surtout sur la course aux milestones. C’est simple dans les règles et si complexe à rentabiliser. Un vrai régal, une réussite intégrale pour qui aime se projeter dans ses futures actions.

Amalfi était le jeu que l’on n’attendait pas, n’ayant pas les visibilités d’un Pfister ou d’un Feld dans nos contrées. Pourtant des francophones ont eu le nez fin et l’œil attentif, car Amalfi sera bel et bien localisé par Sylex en 2021. Une nouvelle excellente qui vous permettra vous aussi de découvrir un jeu d’une telle qualité de gestion sans devoir vous mettre aux symboles japonais (nous avons eu la chance de disposer d’un print anglicisé pour l’occasion, au détriment de la qualité visuelle).

Il vous faudra facilement 30 minutes par joueur pour réaliser toutes vos actions au mieux. Attention, si vous oubliez de construire de nouveaux bateaux, vous risquez fort de vous embêter au port à décortiquer les crevettes. Il faudra réaliser ses personnages dans le bon ordre, construire des bateaux, réaliser des contrats lucratifs pour viser les milestones, avoir des cartes maritimes lucratives, recharger son pain (ne pas utiliser les ressources d’un navire permet de le transformer en pain), préparer les objectifs de manche et sortir à temps ses personnages de fin ! Bref, trop de choses à faire et pas assez de temps / bateaux pour le faire… ou pas ! Ils sont fort quand même ces japonais. 😊

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