Orchard Ocean

Un prix décerné pour les jeux Expert par des Experts

Orchard Ocean

Dès que l’on me parle des jeux japonais, deux choses me viennent à l’esprit : leur côté minimaliste et l’obligation de se ruer sur leur stand dès le jeudi matin à Essen. Je dois avouer que j’ai peu pratiqué la chose, plus attiré par les meeple et kubenbois aux règles complexes, parfois à l’excès. Mes rares expériences dans le domaine est surtout marquée par Machi Koro (Minivilles en français) dont la simplicité et l’efficacité n’est plus à démontrer. J’étais peu convaincu de trouver dans cette gamme un jeu qui allie Expert et minimalisme, lourde erreur.

Orchard Ocean est donc un jeu japonais édité par Analog Lunchbox, mais pour lequel tous les contacts hors japon sont gérés par JaponBrand & MinimalGames (qui les représente à Essen). L’auteur est Masaki Suga qui n’est pas à son premier jeu, dont Airship City qui doit être celui dont l’Europe a « le plus » entendu. L’artiste ayant œuvré est Saori Shibata, normal, vu que avec l’auteur, les deux constituent Analog Lunchbox. 😊

Orchard Ocean, que l’on pourrait traduire par le Verger de l’Océan, vous propose d’incarner un producteur de fruit désireux de créer des vergers au sommet d’îles artificielles et de les vendre dans les meilleures boutiques pour attirer les touristes. Pour ce faire, il faudra de l’argent, de la main d’œuvre et acheminer les produits dans les îles plus éloignées.

Vous commencerez avec un simple port, au milieu de l’océan, sur votre plateau individuel. Vous aurez 12 tours de développement, incluant 4 de production, pour avoir le commerce le plus florissant. Lors de chaque tour, vous aurez à choisir 3 tuiles : Ordre du tour, direction de construction (N-E-S-O) et tuile (île) à construire. Rien de plus, rien de moins. Chaque joueur, dans l’ordre du tour, choisi une des 4 tuiles disponibles sur les 3 lignes, dans l’ordre qu’il veut. Enfin, dans l’ordre d’importance qu’il lui donne, car bien sûr on risque de ne pas avoir LA tuile qui nous est nécessaire si l’on temporise de trop.

Les 3 premières places dans la sélection des tuiles d’ordre du tour et de direction rapportent respectivement de la main d’œuvre et de l’argent. Comme les deux sont important, outre ce qu’elles représentent, l’urgence de les choisir est aussi modifié par le bonus associé.
On place alors la tuile de bâtiment dans la (à 3 joueurs) ou l’une des direction (4 joueurs) par rapport à son producteur, que l’on peut déplacer sur les îles existantes (moyennant finance) pour s’adapter à la direction ou mieux se positionner. On achète une main d’œuvre complémentaire que l’on place où l’on souhaite et on se déplace encore éventuellement pour acheter un nouveau port (plus cher et plus puissant au fil des tours).

A la fin des tours 4-7-10-12 on produit pour récolter or et PV. Toute la complexité du jeu est dans le placement des tuiles (à bien choisir et positionner dans la limite de ses choix) pour produire le plus et le mieux. Il y a 4 sortes de tuiles :

– Les îles de ressources, soit de production (Fraise, Ananas, Raisin, Poisson) soit de transformation (amener du raisin produit du vin)
– Les îles marchandes, où l’on peut vendre les ressources amenées
– Les îles Bonus, où l’on gagne des PV en fin de jeu
– Les ports, au dos des îles acquises chaque tour si on ne veut pas les utiliser ou que l’on achète

Le but est d’amener sa production en suivant les flèches de la ressource au marchand (en passant éventuellement par la transformation), les ports permettant de changer de sens ou d’aller quelques cases plus loin, à ceci près qu’ils ne déplacent pas le poisson.

Et la main d’œuvre dans tout cela ? Et bien, elle vous permet de définir le nombre de personnes qui travaille sur vos îles. Elles sont de deux type, rose et bleu (qui est un upgrade du rose). Sur les tuiles de ressource la main d’œuvre défini le sens dans lequel vous pouvez envoyer vos ressources et/ou le nombre de tuiles qu’elles peuvent traverser en une fois. Dans celles de marchand, cela défini ce que vous achetez comme produit.

Comme un verger peut fournir tous les marchands qu’il peut atteindre (directement ou avec le rebond des ports) et qu’un marchand peut recevoir les produits de tous les vergers, vous essaierez de construire vos îles pour maximiser le profit. Comme vous n’êtes jamais certain de pouvoir construire dans la direction souhaitée et/ou l’île optimale, il va falloir faire des choix et deviner les priorités des autres. Malin en diable !

Au niveau des PV, outre ceux glanés à chaque manche de production, les tuiles ont un coin brisé et si vous construisez le bon type de tuile (île ou port) sur la bonne case, vous glanerez des points. S’ajoute les bonus de fin, le 5 PO = 1 PV et ceux si vous produisez plusieurs types de ressources et vous aurez un vainqueur tournant entre 75 et 110 PV.

Orchard Ocean est une pépite, mais elle est encore un peu brute. Le côté minimaliste. La gestion de l’argent et des PV se fait autour du plateau central, mais si ce dernier bouge (on est amené à prendre et remette les tuiles) c’est un peu le bordel. Préférez, si vous le pouvez, une gestion de l’argent avec des pièces (issues d’un autre jeu ou d’un KS monétaire). Les marqueurs de main d’œuvre et de production sont légers pour nos canevas européens et s’il a un jour le bonheur d’être localisé, il nécessitera une retouche sur beaucoup de points visuels et ergonomiques.

On pourrait croire qu’avec des règles simples, cela en fait un jeu familial, tout au plus connaisseur. Je le croyais aussi. Pourtant, à la pratique, je remarque que le niveau nécessaire est un peu supérieur. Une partie des joueurs l’ayant découvert ont eu du mal à appliquer les notions Rose/Bleu et à utiliser les ports au mieux. Non pas qu’ils n’ont pas pu jouer, voire y prendre du plaisir, mais en positionnant mal (par mécompréhension du principe) ses tuiles, ils n’ont pu produire en suffisance pour se développer.

Orchard Ocean est un jeu excellent, rapide pour un jeu expert (1h20 à 4), à l’interaction « couinante » (« Nooon !!!! Pas celle-là !! Tout mon plan tombe à l’eau !!! »  ) , plein d’opportunisme, nécessitant une bonne vision dans l’espace pour construire ses îles au mieux. Mécaniquement, c’est sans doute le meilleur jeu Connaisseur de 2019. Il ne l’est pas car trop confidentiel et trop minimaliste pour les standards européens, mais qu’il pourrait frapper fort s’il était repris et retravaillé en ce sens.

Promis, les amis de Japon Brand, vous me voyez à l’ouverture d’Essen dès 2020. Amenez moi d’autres pépites et je deviendrai un fan absolu !

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