Deep Shelf
J’adore quand, lorsqu’arrive une boîte à la maison, je découvre un objet bien plus volumineux qu’imaginé. Quand je déballe et découvre des inserts plastiques dont je comprends de suite la praticité. Quand je découvre des plateaux double couche, y compris sur le plateau principal. Tout cela me donne indéniablement plus envie d’y jouer vite qu’en voyant des plateaux à dépuncher qui me donneront une foultitude de petits carrés de plastique. Il faut encore que le jeu tienne ses promesses, mais c’est toujours un pas dans le bon sens.
Deep Shelf est un jeu sorti via KS (après un premier essai avorté) grâce à Ninth Haven Games et qui a convaincu près de 1.800 personnes à le soutenir. On le doit au papa du très bon DinoGenics : Richard Keene. Les illustrations sont le fruit du travail conjoint de Anthony Cournoyer (Crisis, Dicetopia) et Tan Ho Sim (DinoGenics, Ceres).
Dans Deep Shelf, on s’embarque pour Proxima du Centaure afin de donner (encore) une nouvelle chance aux humains. Pour faciliter la collecte des ressources, on s’attaque directement aux mers et après avoir placé sa base de surface, on s’enfonce avec son sous-marin dans les bas-fonds, puis les hauts fonds marins, jusqu’à éventuellement atteindre la faille sous-marine appelée la Tranchée.
A son tour de jeu, on placera deux cartes issues de sa main pour en réaliser les actions (en respectant l’ordre de chacune). Une spécificité : la deuxième carte est la seule à pouvoir activer le pouvoir spécial dont elle peut disposer ET sera bloquée pour le tour suivant. On ne réalise donc ses cartes les plus puissantes qu’un tour sur deux. Il faut faire des choix tant dans l’ordre de ses actes que dans celui du sacrifice d’une carte.
- Construire : Des wagonnets pour déplacer les ressources dans le réseau ; Des tubes pour relier notre réseau ; Des bâtiments pour extraire ou transformer les ressources, étudier ou entretenir nos installations ; Notre super structure qui nous fourni une carte dédiée et des pouvoirs spécifiques.
- Extraire : Seul le sous-marin ou les usines d’extraction sont à même d’exploiter les sols. Il faut cependant payer le coût d’entretien (qui augmente avec les constructions en place) avant d’exploiter le sol.
- Transformer : Les ressources en surface (qu’il faut ramener) sont améliorées en leur version raffinée. Les bâtiments de transformation construits en profondeur peuvent aussi raffiner ce qui les entoure et traine sur le sol autour d’eux (si cela n’appartient pas à autrui)
- Déplacer : Un point de mouvement pour le sous-marin (qui ne peut pas atteindre les hauts fonds qui demande 2 points) et 2 points pour chaque wagonnet (mais qui ne se déplacent que dans le réseau de tubes). Arriver sur une case inexplorée permet de tirer deux tuiles pour répartir ou choisir celle qui convient.
- Docker et Marchander : Après un éventuel retour immédiat du sous-marin, on peut décharger (ou charger) les ressources depuis la case devant notre dock jusqu’au stockage de surface. Ensuite on peut aller au marché pour acheter / vendre jusqu’à deux ressources raffinées.
- Améliorer : Acheter, via du Kelp et des ressources raffinées, des améliorations qui nous faciliteront la vie (comme pouvoir se déplacer dans les hauts fonds avec le sous-marin) ou généreront des PV de fin. Si le joueur dispose de scientifiques et/ou de labos, il pourra aussi progresser sur une piste de la science pour des bonus et des PV de fin.
L’exploitation de la planète va avoir un impact sur son écosystème. Lorsqu’un hexagone est vidé de ses ressources ou que l’on construit une usine de raffinage, on fait progresser un marqueur qui déclenche des événements divers. Cela a un impact pour le joueur responsable (toujours positif), mais aussi sur le marché et sur un grand dragon des mers qui vient perturber les joueurs.
Le jeu va ainsi tourner de joueur en joueur, chacun activant ses deux cartes (bien souvent pour faire des mini-actions) jusqu’à ce que la fin soit déclenchée via :
- Atteindre le haut de la piste de l’écosystème planétaire
- Chaque case supérieure des 3 pistes de science soient atteintes par quelqu’un
Un dernier tour pour chacun et on compte les points. Il y a des points un peu partout sur le jeu, dans les développements personnels, sur certaines cases découvertes, dans la tranchée, sur la piste de science, le premier à avoir été dans la zone profonde, … Mais une d’entre elles est pourvoyeuse de pas mal de PV : la majorité de construction dans les bas et hauts fonds. Il n’est pas impossible que lors du dernier tour un des joueurs décide du vainqueur en construisant, ou pas, dans un de ces espaces. Comme on somme et divise en cas d’égalité on peut vite perdre 4 ou 5 PV selon que l’on se retrouve seul ou l’on doive partager les points. Comme la partie fleurte avec les 30 PV pour le vainqueur (et que l’on termine souvent dans un mouchoir de poche), on peut passer de premier à 3ième sur ce simple choix. Alors que l’on maîtrise le reste du jeu sur base de ses choix propres, voir la victoire s’envoler (ou se voir offerte) avec un possible kingmaking est toujours frustrant. Il faudra sur-construire pour éviter les déconvenues…
Au final, Deep Shelf est clairement un jeu superbement produit, malgré quelques manquements dans les rappels d’action (paiement via la surface et coûts supplémentaires des hauts-fonds). Vous aurez besoin d’y rejouer pour faire moins d’erreurs, car il y a quelques oublis de jeu possible comme les déplacements des wagonnets ou l’écosystème se modifiant lors des constructions de raffinerie. Si l’envie d’essayer chaque faction (qui n’a pas les mêmes cartes, prix et pouvoirs) est forte, je me demande s’il n’y aura pas une certaine lassitude dans les parties qui se ressembleront un peu trop furieusement (on tourne souvent sur 2-3 cartes). Deep Shel fait partie de ces jeux actuels (Terminus, Salton Sea) où on a l’impression par moments de faire du surplace. Ce n’est pas aussi marqué que dans les jeux cités, mais il n’y a jamais de vrai sentiment d’envolée.
Heureusement on sent l’équilibre des factions et surtout ils ont eu la bonne idée de proposer une série de scénarios qui vont vous faire vivre une campagne et ainsi garder une envie d’y jouer et rejouer. J’aime cet effort car la curiosité et l’envie de voir ce qu’apportera ce mode (avec des cartes supplémentaires pour les joueurs) permet de ne pas voir Deep Shelf rangé dans les armoires après 4-5 parties (surtout qu’il prend de la place). C’est un beau produit, bien édité et donnant envie d’y revenir en partie pour son matériel, en partie pour découvrir ses factions. Il faudra cependant un temps conséquent devant vous (1 h par joueur sur notre première partie, qui peut sans doute diminuer) pour vous y mettre. Mais les WE jeux sont là pour vous. 😊