Shiver me Timbers

Un prix décerné pour les jeux Expert par des Experts

Shiver me Timbers

J’aime ne rien attendre d’un jeu. Parce que je ne me suis pas renseigné dessus avant qu’un ami me le propose ou qu’il n’a fait aucun buzz dans la communauté avant sa sortie ou pour son KS. Du coup, j’arrive la fleur entre les dents, prêt à jouer sans doute plus détendu. Mauvaise surprise, je ne regretterai pas longtemps, bonne surprise, le plaisir sera supérieur.

Shiver me Timbers est le premier jeu de Michal Vitkovsky édité par Weltflucht Verlag, la maison d’édition qu’il a créé pour le KS. Ce sont de jeunes artistes qui se sont occupés des illustrations, Andy Monks et Unique Litani Soparie, qui, sans en être à leur premier jeu, peuvent encore compter leurs participations ludiques sur les doigts d’une main.

Shiver me Timbers vous emmène dans les caraïbes, en tant que pirate sur un navire modulable, face à une carte composée de routes navigables qui varieront du tout au tout à chaque partie. Six îles majeures sont ainsi reliées par des longues ou des courtes routes maritimes sur lesquelles naviguent des vaisseaux de marchandise. Avec l’expérience les joueurs placeront ces routes selon les objectifs de partie qu’ils visent.

Les objectifs sont variés et on en compte un de plus que le nombre de joueurs. La fin de jeu sera déclenchée lorsque tous sauf un auront été accomplis par au moins un joueur, mais s’ils peinent à les réussir (prenant leur temps ou plaisir dans le jeu), un maximum de 20 tours de jeu est fixé.

Les joueurs disposent d’un plateau où placer leur trésor (matériel ou monétaire), ainsi qu’un coffre sécurisé où ils peuvent placer leur ressources en sécurité, mais ne peuvent plus les récupérer. Le navire fourni est modulaire, allant de 1 à 7 en voile (vitesse de déplacement et de pré-abordage), canon (force de combat et de recherche de trésor), cale (stockage des produits et capacité de réaction). De base, tous ces marqueurs sont placés à 3 et ils ne peuvent descendre sous 1.

Chaque tour permet au joueur de réaliser 3 actions (plusieurs fois la même au besoin) parmi :

* Se déplacer : La vitesse dépend de la taille de sa voile + un bonus/malus aléatoire chaque round

* Acheter : 3 îles permettent d’acheter Cacao, Sucre ou Rhum a un bon prix. On remplit ses cales autant qu’on veut / peut avec une seule action.

* Vendre :  4 îles veulent acheter les ressources Cacao, Sucre ou Rhum a un prix intéressant. Toutes acceptent de racheter des trésors déterrés par les joueurs. Une seule action suffit pour vendre autant que l’on souhaite.

* Améliorer : Sur les îles on peut augmenter la puissance de votre navire, payant 100 Gold * le niveau atteint dans un domaine (passer à 4 canons = 400 gold).

* Acquérir une carte : Toutes les îles permettent de collecter des infos sur un trésor, tandis que 3 îles permettent spécifiquement d’engager des membres d’équipage, d’apprendre un rituel ancien ou de prendre une mission du gouverneur.

* Chercher un trésor : Une fois dans l’île adéquate (selon ce qui est indiqué sur la carte) on part à la chasse au trésor. C’est la force du navire (canons) qui décide de votre vitesse de progression sur la recherche.

* Attaquer un monstre : Après avoir trouvé ou invoqué un des deux monstres marins du jeu, un affrontement épique a lieu, un peu comme une chasse au trésor, où l’on perd possiblement (sûrement !) des morceaux de son navire pour cette chasse mémorable.

* Harceler un navire : Tirer au canon sur un navire marchand ou joueur pour l’affaiblir, uniquement si l’on dispose de plus de voile que son adversaire.

* Attaquer un navire ou une forteresse : L’assaut de l’adversaire où l’on oppose ses canons pour avoir (ou pas) un avantage et où l’on joue des cartes de combat pour pousser l’autre hors de la planche. On pille un navire de joueur ou on récupère le bateau marchand avec son bonus.

En plus de ces actions de tour, on a des bonus fournis par la famille que l’on rassemble ou la spécialité que l’on a choisi en début de partie. On peut jouer les cartes d’équipage ou de rituel moyennant paiement lors de son tour ou de celui d’un autre joueur, pour influer sur un résultat ou se donner un avantage. Les objectifs donnés par le gouverneur de Port Royal permettent d’obtenir des avantages via des titres de noblesse. On ne manque donc pas d’action ni de rejouabilité dans le jeu.

En fin de partie on comptera les PV récoltés en jeu (indiqués sur des sceaux sur les cartes), l’or disponible (1000 Gold = 1 PV), les objectifs atteints (premier à l’atteindre 10 PV, les autres 5 PV), les objectifs annoncés (en début de jeu on cache dans son coffre 2 objectifs que l’on dit faire et qui rapportent un bonus de 5 PV). On finira avec des scores allant de 25 à 50 PV en moyenne.

Le jeu est d’un niveau Connaisseur long, avec ses 30 à 45 minutes par joueur (surtout si l’on se promène 😊), car malgré les explications longues dues au nombre d’actions possibles, le jeu tourne facilement par la suite avec ses actions focalisées sur les objectifs choisis tout en restant attentif aux actions des autres joueurs.

L’immersion est forte avec son navire évolutif auquel on place et enlève voile, canon, cale et qui vous permet de vous plonger réellement dans le jeu en comparant les navires. Les actions sont toutes tournées vers les clichés majeurs des films de pirates, avec ses négociations avec l’autorité, les monstres, les chasses au trésor, l’attaque des navires à distance et à l’abordage, la magie des îles et les membres d’équipage à l’allure malveillante. Les cartes et leur objets à trouver, la famille emprisonnée ou perdue, les amours improbables, sont autant de choses qui font que quelque soit votre connaissance filmographique sur les pirates, vous trouverez une image mentale à laquelle vous accrocher.

Pour un jeu qui n’était pas attendu, c’est une belle découverte et une vraie réussite, qui plait dès la première partie, même avec des cartes en anglais, à un public large. On peut lui reprocher une longue durée de partie, avec parfois une mise en condition pour réussir un objectif assez long, mais comme on s’amuse en cours de route (souvent au détriment des autres, lors d’une attaque ratée ou une opposition perdue face à un monstre), le temps passe vite. Le plus grand ennemi au rythme étant le joueur qui réfléchit et calcule trop ses coups avant de jouer.

On ne se rendra compte de toute sa profondeur et des tactiques à appliquer qu’après plusieurs parties, apprenant que le jeu commence avec les décisions sur la mise en place de la carte des voies navigables. Prendre des tours à récolter des cartes ou développer son navire étant intéressant sur le long terme, vous essaierez cependant de le faire lorsque les vents sont mauvais et ralentiraient vos déplacements.

On apprécie vraiment le nombre d’actions et de décisions possibles, le tirage d’une carte (au trésor ou de mission) vous faisant subitement revoir vos priorités suite à une « occasion unique de faire fortune ». Des noms d’oiseau et des menaces fusent durant la partie et vouloir boire dans le crâne d’un autre joueur est somme toute logique. 😊

Il ne lui manque que la francisation et j’espère qu’un éditeur francophone se penchera sur son sort. Je doute cependant qu’il garde son titre en l’état, mais soit francisé par une expression de pirate qui fasse écho aux amateurs de la langue de Voltaire. Sabre de bois !

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